Troubles dépressifs
Les troubles dépressifs font partie des troubles de santé mentale rencontrés aussi bien chez les enfants/adolescents que chez les adultes. Ils sont le résultat de dysfonctions dans les réseaux de communication du cerveau, particulièrement ceux qui touchent à la sérotonine. Ils sont souvent caractérisés par la présence d’une humeur dépressive, triste, irritable ou un sentiment de « vide » sans espoir accompagnée également de symptômes physiques et cognitifs, altérant significativement le fonctionnement du jeune.
Les troubles dépressifs peuvent prendre plusieurs formes selon leur apparition, la durée et la cause présumée. Ils incluent les troubles principaux suivants :
- Trouble disruptif avec dysrégulation émotionnelle
- Trouble dépressif caractérisé (majeur)
- Trouble dépressif persistant (dysthymie)
- Syndrome dysphorique prémenstruel
- Trouble dépressif induit par une substance/un médicament
- Trouble dépressif lié à une condition médicale autre
Souvent les troubles dépressifs (caractérisé et persistant), sont accompagnés d’une détresse anxieuse (selon le DSM-5), c’est-à-dire que la personne ressent un ou plusieurs symptômes anxieux tels que :
- Sentiment d’énervement ou de tension
- Sentiment d’agitation inhabituel
- Difficultés de concentration dues à des soucis
- Peur que quelque chose d’horrible ne survienne
- Sentiment d’une possible perte de contrôle de soi
Trouble dépressif caractérisé (dépression majeure)
Le trouble dépressif caractérisé représente la forme la plus classique. Ce trouble se révèle par la présence soit d’une humeur dépressive ou soit par une perte d’intérêt ou de plaisir, où peuvent se greffer au moins quatre autres symptômes, depuis une période de plus de deux semaines. Ces symptômes marquent un changement par rapport au fonctionnement antérieur selon le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-5, 2016) :
- Perte ou gain de poids
- Insomnie ou hypersomnie
- Agitation ou ralentissement psychomoteur
- Fatigue ou perte d’énergie
- Sentiment de dévalorisation ou de culpabilité excessive ou inappropriée
- Diminution de l’aptitude à penser ou à se concentrer
- Pensées suicidaires, tentative de suicide
Évidemment, les symptômes associés aux troubles dépressifs induisent une détresse significative ou une altération du fonctionnement dans plusieurs domaines de la vie quotidienne tels que sur les sphères sociale, scolaire et du travail.
Le dépistage des signes de dépression chez les jeunes enfants et les adolescents demeurent néanmoins un défi, puisqu’ils sont souvent masqués par l’apparition de comportements qui semblent coïncider avec la puberté ou vus comme des pertes de contrôle en lien avec ce que vit le jeune. Chez l’enfant, ils peuvent même se présenter par une accentuation de l’anxiété de séparation.
L’irritabilité chronique : un symptôme clé
Dans plusieurs des problématiques vécues durant l’enfance et l’adolescence, l’irritabilité demeure un signe précurseur ou se voit comme un symptôme d’une situation difficilement vécue et nécessitant le soutien de l’entourage. Il n’est pas rare que des raisons justifiant une consultation en urgence sont fréquemment associées à une irritabilité ou une colère explosive et persistante, ou en raison de crises de rage. Il est impératif d’identifier pour chaque enfant, les stresseurs psychosociaux, les troubles d’apprentissages ou de communication, mais également les autres troubles neurodéveloppementaux ou une combinaison de ces troubles/facteurs lorsqu’un enfant persiste à se montrer irritable, puisque l’irritabilité est souvent le symptôme de dysfonctions sous-jacentes.
D’ailleurs, plusieurs auteurs affirment que l’irritabilité persistante au-delà d’une année chez l’enfant demeure un prédicteur de risque de développer une dépression majeure et/ou un trouble anxieux à l’adolescence. Elle doit donc être sérieusement prise en considération dans les motifs de prises de décision de consulter un professionnel.
D’ailleurs, dans l’objectif d’adresser l’irritabilité chez le jeune enfant, une nouvelle catégorie diagnostique a été intégrée (Trouble disruptif avec dysrégulation émotionnelle TDDE) dans le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-5, 2013), dont la différenciation avec les trouble bipolaire, trouble oppositionnel avec provocation (TOP), TDAH et trouble explosif intermittent (TEI) doit être considérée.
Trouble disruptif avec dysrégulation émotionnelle (TDDE, en anglais DMDD) représente un trouble où l’irritabilité chronique est le symptôme clé:
Ces enfants sont aux prises avec une humeur négative et des crises de colère excessives qui parfois n’ont pas de commune mesure avec l’âge et la nature du déclencheur. Les crises d’agressivité sont notoires et révèlent une hypersensibilité face à diverses situations. Il faut préciser que la dimension d’irritabilité est plus importante que les comportements d’opposition, et, est à ne pas confondre avec l’excitabilité souvent associée au TDAH et/ou à l’épisode de manie chez un jeune.
Trouble disruptif avec dysrégulation émotionnelle (TDDE selon DSM-5, 2016) :
Voici quelques principaux critères (ne sont pas tous inscrits) :
- Crises de colère sévères récurrentes se manifestant verbalement (p.ex. accès de fureur verbale) et/ou dans le comportement (p.ex. agressivité physique envers des personnes ou des objets) qui sont nettement hors de proportion en intensité et en durée avec la situation ou la provocation.
- Les crises surviennent, en moyenne, trois fois par semaine ou plus.
- L’humeur entre les crises de colère est de façon persistante irritable ou colérique quasiment toute la journée, presque tous les jours, et elle est peut être observée par les autres (p.ex. parents, professeurs, pairs).
- Diagnostic ne doit pas être porté pour la première fois avant l’âge de 6 ans ou après l’âge de 18 ans.
- D’après l’anamnèse ou l’observation, l’âge de début des critères est inférieur à 10 ans.
Les enfants aux prises avec un TDDE peuvent également présenter certains déficits cognitifs, entre autres, un déficit de flexibilité cognitive qui les rend plus susceptibles de ressentir de la frustration et de faire preuve d’irritabilité et de comportements agressifs en raison d’une rigidité cognitive récente et/ou persistante.
Ces enfants peuvent également sembler manquer d’inhibition et réagir de façon impulsive tel qu’en présence d’un TDAH. Ainsi, la distinction TDDE et TDAH peut être parfois délicate, mais il faut savoir que l’irritabilité n’est pas un symptôme du TDAH. Le TDDE se fonde sur des symptômes thymiques (en lien avec l’humeur) contrairement au TDAH. De plus, il est souvent rencontré un pré-diagnostic de trouble oppositionnel avec provocation (TOP) avant la précision du diagnostic de TDDE. En plus, le TDDE peut se présenter de façon comorbide au TDAH et aux troubles anxieux en bas-âge. Certains enfants vont également avoir un diagnostic de trouble de dépression majeure.
Pistes d’intervention à prioriser dans les troubles dépressifs :
Parmi les méthodes reconnues comme très efficaces, mentionnons : la thérapie cognitivo-comportementale; la thérapie interpersonnelle; la thérapie psychodynamique, etc. Une utilisation judicieuse de la médication chez les jeunes peut également s’avérer nécessaire.
Les troubles dépressifs marquent malheureusement l’enfance et l’adolescence : ces jeunes se sentent moins bien, se dévalorisent, n’ont plus d’estime d’eux-mêmes et connaissent des échecs, le tout provoquant une grande détresse, et peuvent ainsi tenter de commettre un geste dévastateur pour eux et leur entourage. Il faut donc dépister de façon précoce et mettre rapidement en place de l’aide visant à améliorer la confiance en soi, les relations et soutenir l’entourage familial. Rappelons que la thérapie est la première mesure à prendre pour traiter la dépression.
Références :
- Mini DSM-5 Critères diagnostiques, par American Psychiatric Association. (2016). Elsevier Masson SAS.
- Diagnostic and statistical manual of mental disorders fifth edition DSM-5TM, American Psychiatric Association. (2013). American Psychiatry Publishing.